PHILTRES INFAMES ...
... L'air devient tout blanc
Invité N° 21: FRED
Encore plus dur que les 15 chansons mais ça m’a donné l’occasion de remettre le nez dans de vieux livres pas ouverts depuis longtemps, on redécouvre...
J’aurais pu mettre cinq Baudelaire mais place un peu aux autres.
J’ai mis les textes mais difficile de mettre en forme sur le téléphone, si le cœur t’en dit... de plus les haïkus n’ont pas de titre, alors difficile de le citer sans le texte.
J’ai aussi mis un petit commentaire après chaque poème, tu jugeras s’ils valent le coup ou non
À plus et bon courage confiné !
Fred
La destruction
Sans cesse à mes côtés s'agite le Démon ;
Il nage autour de moi comme un air impalpable;
Je l'avale et le sens qui brûle mon poumon
Et l'emplit d'un désir éternel et coupable.
Parfois il prend, sachant mon grand amour de l'Art,
La forme de la plus séduisante des femmes,
Et, sous de spécieux prétextes de cafard,
Accoutume ma lèvre à des philtres infâmes.
Il me conduit ainsi, loin du regard de Dieu,
Haletant et brisé de fatigue, au milieu
Des plaines de l'Ennui, profondes et désertes,
Et jette dans mes yeux pleins de confusion
Des vêtements souillés, des blessures ouvertes,
Et l'appareil sanglant de la Destruction !
Charles Baudelaire
(Les Fleurs du mal)
Étonnant poème qui rappelle les affres du junkie moderne avec seringue intraveineuse.
Sunday Morning
John Cale - Lou Reed
(The Velvet Underground)
Mélancolie absolue, élégance rock.
Pauvre Martin ( extraits )
Et quand la mort lui a fait signe
De labourer son dernier champ,
De labourer son dernier champ,
Il creusa lui-même sa tombe
En faisant vite, en se cachant...
Pauvre Martin, pauvre misère,
Creuse la terre, creuse le temps!
Il creusa lui-même sa tombe
En faisant vite, en se cachant,
En faisant vite, en se cachant,
Et s'y étendit sans rien dire
Pour ne pas déranger les gens...
Pauvre Martin, pauvre misère,
Dors sous la terre, dors sous le temps!
Georges Brassens
Se passe de commentaire...
Passant la nuit au temple
Mon véritable visage Contemple la lune
Bashô (1644 - 1694)
(A Kyoto rêvant de Kyoto)
Grâce et légèreté, introspection contemplative. Regret de ne pouvoir lire dans la langue d’origine.
Quand je pense à ma propre mort
Quand je pense à ma propre mort
Je pense à des voitures garées dans
un parking
quand je pense à ma propre mort
je pense à des poêles à frire
quand je pense à ma propre mort
je pense à quelqu’un te faisant l’amour
en mon absence
quand je pense à ma propre mort
j’ai de la peine à respirer
quand je pense à ma propre mort
je pense à tous les autres qui attendent la leur
quand je pense à ma propre mort
je pense que je ne pourrai plus
jamais boire de l'eau
quand je pense à ma propre mort
l'air devient tout blanc
et les cafards dans la cuisine
se mettent à trembler
et quelqu'un devra jeter
mes sous-vêtements propres ou sales
à la poubelle.
Charles Bukowski
(L’amour est un chien de l’enfer)
Pour la rage qu’il a mis à atteindre le néant, son urgence d’écrire et la sobriété de sa langue...
G.BRASSENS: Pauvre Martin