VISA pour la PAIX ...
... MOKSHA
La rue gît morte sous le froid
Je vais où m’emmènent mes pas
Ça fait soixante- dix ans déjà
Que je déambule ici-bas
Mais je n’ai pas fini ma ronde
Et je continue à briller
au firmament de ce vieux monde
Juste comme une étoile suicidée…
TALKING ABOUT GANGA RIVER BLUES
… à quoi rêvent les gladiateurs ? Au jour où ils seront sur les gradins à contempler les tyrans s’entretuant pour quelques heures de liberté factice !
Dans le port de Calcutta le bateau-livre a fait sa première halte. Une horde d’analphabètes l’attendait.
Vers la gare d’Howrath les hommes-chevaux fendaient la foule dans un tourbillon de folie, ils ne contrôlaient plus leur énorme pousse-pousse. Hennir de vapeur, périr au labeur…
La police a tiré : cinq leaders communistes ont été tués.
Les naxalites enseignent l’élimination des conceptions erronées dans le parti et préparent la guérilla urbaine. L’étudiant traduit le Bengali.. Ils posent des bombes dans les avions et brûlent les bus gouvernementaux. L’étudiant roulent les R en anglais. Les employés du zoo sont en grève. Six tigres sont morts de faim. L’étudiant traduit mais commence à se lasser. Les transports de touristes sont supprimés dans le nord de la ville , trop dangereux. Les paras occupent les campagnes. L’étudiant a disparu.
Sinistre scène à la fin de notre chicken-curry. Le serveur enveloppe dans la nappe les restes de riz, les os et les débris de chapati et file le tout a un gamin affamé qui se jette dessus et dévore nos déchets avec délectation.
Comme les hommes délaissaient leurs épouses pour gagner la forêt pour méditer et prier, ils décidèrent d’orner le temple de scènes érotiques pour ramener dans leur foyer ces ascètes de la chair. Le Temple restait le seul lieu de rencontre. Il n’est pas dit dans l’histoire si l’orgie de positions qui s’ensuivit eut lieu ou non ici même… L’étudiant n’est plus là pour répondre. Il n’attendait même pas un bakchich. Il pleut encore. Les crémations sont noyées ; Il pleut toujours. Un bus pour Jhansi, un bac pour passer une rivière en crue et ivre de fatigue le train de nuit toujours sans dormir.
MESURE ou DEMESURE ? RADEAU ou PENICHE ?
L’absence bien (in)connue de frontière entre la folie et la non folie ne dispose pas à accorder une valeur différente aux perceptions et aux idées qui sont le fait de l’une ou de l’autre.
L’étudiant n’est plus là pour me contredire ou dialoguer . Je suis seul à délirer sur ce cahier d’écolier.
QUI EMBAUME et fait flotter le TOUT ?
Il faudrait que j’arrive à dormir. Un nuage bas et plombé attriste la dépouille d’un zébu que se disputent les chiens, les corbeaux et les vautours du pressing d’à coté.
La nuit tombe sur Varanasi…
Carnet de Route / 1970 / Extraits / Léon Cobra