Auréole du temps ...
... dans la glaise du matin
Café gourmand chez Galligrasseuil.
Invitée N° 13: Monique J.
Merci de nous faire participer à ce grand challenge, qui nous sort de notre torpeur pré-hibernation ; et longue vie au Tréponème Bleu Pâle qui persiste envers et contre tous les aléas actuels. Un peu de dérision dans la morosité ambiante ça ne fait pas de mal.
Comme tu peux le constater je fonctionne au rythme lent des caravanes. A ma décharge ça faisait longtemps que j’avais laissé tomber la poésie ; mais je m’y suis replongée avec beaucoup de plaisir.
Nous devrions cesser de croire Que la bienveillance est une vertu infaillible. Que la douceur est solide Que l’oreille qui écoute ne tombe jamais malade. Toute personne qui apporte de la légèreté échange sa chaleur contre un morceau de nos abysses Et nous en redemandons encore et encore, Sans savoir où s’entassent ces mauvais moments dans la vie de ces autres qui nous prêtent leurs nuances quand nous manquons de couleurs.
C. COULOMB dans le recueil «Abîmer la douceur»
Le zèbre, cheval des ténèbres
Lève le pied, ferme les yeux
Et fait résonner ses vertèbres
En hennissant d’un air joyeux.
Au clair soleil de Barbarie,
Il sort alors de l’écurie
Et va brouter dans la prairie
Les herbes de sorcellerie.
Mais la prison sur son pelage,
A laissé l’ombre du grillage.
Robert DESNOS le zèbre
La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur, Un rond de danse et de douceur, Auréole du temps, berceau nocturne et sûr, Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu. Feuilles de jour et mousse de rosée, Roseaux du vent, sourires parfumés, Ailes couvrant le monde de lumière, Bateaux chargés du ciel et de la mer, Chasseurs des bruits et sources des couleurs, Parfums éclos d'une couvée d'aurores Qui gît toujours sur la paille des astres, Comme le jour dépend de l'innocence Le monde entier dépend de tes yeux purs Et tout mon sang coule dans leurs regards.
Paul ELUARD, Capitale de la douleur, (1926)
Tristan Tzara
La chanson d'un dadaïste qui avait dada au cœur
fatiguait trop son moteur qui avait dada au cœur
l'ascenseur portait un roi lourd fragile autonome il coupa
son grand bras droit l'envoya au pape à rome
c'est pourquoi
l'ascenseur
n'avait plus dada au cœur
mangez du chocolat
lavez votre cerveau
dada
dada
buvez de l'eau
la chanson d'un dadaïste qui n'était ni gai ni triste et aimait
une bicycliste qui n'était ni gaie ni triste
mais l'époux le jour de l'an savait tout et dans une crise envoya au
Vatican leurs deux corps en trois valises
ni amant
ni cycliste
n'étaient plus ni gais ni tristes
mangez de bons cerveaux
lavez votre soldat
dada
dada
buvez de l'eau
III
la chanson d'un bicycliste qui était dada de cœur qui était donc dadaïste comme tous les dadas de cœur
un serpent portait des gants il ferma vite la soupape mit des gants en peau d'serpent et vint embrasser le pape
c'est touchant
ventre en fleur
n'avait plus dada au cœur
buvez du lait d'oiseaux
lavez vos chocolats
dada
dada
mangez du veau
Louis Guillaume Fortune de vent
Editions José Corti,1964