Plaques Tectoniques ...
... CATHARSIS
N° 2000
Collage: José GALDO
IL RESSUSCITERA D’ENTRE...
Tu penses que ma nuit s’est amputée de ses soleils depuis que je danse dans ma tombe. Tu penses qu’anéanti par la foudre de terre je n’ai plus droit au rêve ni à la voix.
Absent au rêve, je l’ai toujours été, comme un objet surtout présent à sa matière. Mais à la voix... je ressusciterai donc d’entre les voix.
Que ma bouche morde à la terre, que la terre, mon amante jadis, contre laquelle je fis la guerre, cède au couteau en une fois !
Par l’incanté et ses mystères, par ce qui est en suspension dans l’énergie et la prière, par tous les morts de l’entre-terre que damne un trop-plein de lumière, par la voix des origines, qui fit trembler la terre et les couches de l’air : tance la nuit, lance la flèche, perfore la croûte par l’en-deçà, malgré la fin de l’en-dessous !
Et se rebelle : la bête n’est qu’à peine affleurante au caveau.
Et s’extirpe : gaine élonguée de l’échauffourée, outre acculée au monde des trombes, lance monstre ses érosions, en lambeaux de peaux.
Et repte : rouille ce qu’elle mouille, barbouille les cavités.
José GALDO
Et poisse : les offrandes aux dieux, les rites moites des moignons, qui suintent d’un râle au respir du poison.
Et jaillissent : voraces du limon, crocs acérés, chiens galeux, mornes et quatre-dents en trombe canine. Dans le ciel tournent en vapeurs, renouent avec la force, bifurquent vers les territoires incendiés, ne se lamentent plus qu’on ait perdu la vieille enveloppe, la vieille carne délaissée sur les pals.
C’est une folie neuve qui répand ses gangrènes, sa fête régénérée. Nés du néant, des objets nus et brillants, aux aigus et tranchants redoutables, palpitent sur les rocs, se transforment à vitesse de foudre ou s’écoulent en pâte de langueur, définissant de nouvelles langues, langues tendues, charnières entre la mort qui fut et la fin à venir.
Car il est un volcan d’esprit, vierge et incontrôlé, qui sécrète une lave de formes qui sont les concentrés de l’indicible bombardé en éruptions d’espaces et qui lors de la retombée se figent en basaltiques inanitions.
Mais avant cet état de loques refroidies, il y a eu perforation et crémation d’un état de l’espace qui reste troué et brûlé d’un infini d’incandescence.
Malgré la grande violence, les plaies se refermeront, car dans l’espace la terre seule est impuissante.
Jean-Pierre ESPIL
(extrait de la LA TERRE MANGE SON CERVEAU, éditions Blockhaus)
Collage: LLYS DANA / Jacques JUIN