RIEN NE VA PLUS ...
... ENVOL
S. BATSAL
http://batsal.blogs.com/
L'Envol
J'écris, j'aligne des mots.
Je ne sais plus très bien ce qu'on me
reproche.
Ah, oui. Il paraît que tout ce que j'écris
finit par arriver...
C'est grave, ça ?
Oui, il paraît. Il paraît que c'est pire
que le terrorisme, pire que de jeter une bombe dans la gare de Milan au moment
des départs en vacances !
Hier, j'ai ramassé un morceau de plâtre
dans la cour de la promenade et j'ai écrit, sur le mur de ma cellule :
« La paix en Haïti. Aristide sera jugé et
Cesare Battisti libéré. »
J'écris comme ça vient. Je ne réfléchis
pas. Vous savez que des hommes en noir m'ont proposé des sommes considérables
pour écrire des trucs comme « L'ultra-libéralisme est l'opium du
peuple » ou bien encore « Vivre, c'est gagner ! »
On m'a proposé de réécrire l'Histoire. J'ai
refusé. J'écris ma vie dans ma tête. Ma cellule sent mauvais, personne ne me
demande au parloir. J'en ai marre d'attendre. J'ai décidé d'écrire avec mon
sang.
Une plaie minuscule, presque rien.
Ça coule, c'est rouge.
Avec mon ongle, j'écris :
« Je suis un oiseau bleu dans le ciel de la Guadeloupe.
Le Rêve sur la jetée
Quand j'ai vu le grand panneau annonçant le
Domaine de May, j'ai tout de même ralenti. Je roulais à 110 et devais avoir un
taux de gammaglobulines autour de 280... Je tenais bien la route et j'avais
bouclé ma ceinture. J'ai encore roulé jusqu'au 8 à Huit où j'ai pris une
bouteille de rhum Damoiseau. Tu sais, cette merde guadeloupéenne qui rend soit
zombie, soit sobre à tout jamais, cette boisson que j'ai juré de ne plus boire
et que je bois tout de même quand la tristesse me prend...
J'ai payé à la caisse. Toujours la même
caissière, très petite, indienne, avec cette cicatrice entre les seins. Un
jour, je m'en étais étonné et elle m'avait répondu : « J'ai été
opérée de la thyroïde... » J'avais bien ri. Oui, le nuage de Tchernobyl,
m'étais-je dit, celui qui est passé sur le sud de la France
J'ai laissé tomber la bouteille de rhum par
terre avec un : « Oh, excusez-moi... » Puis je suis sorti du
magasin.
Ma voiture m'attendait. J'ai roulé vers
Pointe-à-Pitre. Après ? Je ne sais plus. J’étais assis sur la jetée du
Moule, face à l’océan. J'ai rêvé d'un aéroport où une femme m'attendait. Je
l'aimais et elle aussi m'aimait. J'avais envie de la serrer tout contre moi,
mais c'était impossible.
Une voix officielle a dit :
« Veuillez
passer dans la file de gauche, Monsieur P. Vous n'êtes plus vivant ! »
J'ai regardé la montre que mon fils Lucien
m'avait offerte juste avant mon départ. Les aiguilles avaient disparu, le
cadran était blanc. Alors, je crois bien avoir compris...
Jean-Pierre PLANQUE
http://jplanque.pagesperso-orange.fr/

RETENUE
J’écoute la parole muette
Sur les lèvres
Dans les yeux
De ceux qui se taisent
J’ai appris le langage des traits
Et du mot sur le bout de la langue
Laissez moi retranscrire à ma guise
Sans vocable m’as-tu vu.
La noblesse du cœur appelle la retenue.
Fadila BAHA / le grain des mots / Editions Clapas.
Le N° 1000 continue demain...
@ suivre...