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Le Tréponème Bleu Pâle
26 juin 2013

POP and STOCK OPTIONS ...

 

 

 

... GRAINE de MALICE

 

 

 

Cesam

 LA CESAM  ( Hugo Canesson )

Cinquième et dernier épisode

 

Ben et l'organisateur assis sur une caisse d'ampli de type Fender règlent leurs affaires.

Moi je suis là toujours. Dans mon cuir noir derrière le caissier. Il est à son affaire. Il fume des blondes. Le cendrier est plein. Il rend la monnaie, il vend des billets pour le concert punk de ce soir.

Dix sept euros les deux groupes :"Panther Division" et "God blesse you".Que du bon…

Un jeune garçon aux cheveux verts couleur Saint Pol de Léon venu en car tout exprès, mégote sur le prix de la place :

"J'ai pas vu le premier groupe ! tu peux me faire un prix?" Le caissier lui fait un prix.

"Ok, c'est dix euros". Le chou - fleur en question aligne des pièces de dix centimes. Un peu de tout avec rien, de la ferraille en petite monnaie. Deux filles se tiennent, se soutiennent. Elles sont torchées. Un type raide démâté se roule un pétard. Il a du mal à lécher les feuilles. Son joint n'est pas allumé que c'est déjà un mégot. Soudain, ruade dans le hall. Fin de première partie. C'était les "God blesse you" ou l'inverse. Tous au bar. Des mecs en sueur. Des vapeurs. Ils sautent partout la bave aux lèvres. Moi je suis là derrière le caissier. Une punkette pas trop détruite me demande de mettre son pull aux vestiaires. Je prends l'affaire en mains et lui accroche sa serpillière au cintre. Ben et l'organisateur parurent interloqués. Je l'avais bien joué.

Tout me paraissait sale dans ce hall. Les crêtes dans la base cour se heurtaient à l'intemporalité. Un cauchemar. Une vision : celle d'un peuple, une nation, un tas de gens livrés au festin de la débrouille. A nouveau nous fendîmes la meute. Par dessus par dessous. Ils se ruent les uns sur les autres. Une odeur de fin du monde.

Enfin dehors. Enfin dans la voiture.Ben alluma aussitôt un cigare.Stop ! On réfléchit.

"Merde ! L'organisateur ne m'a pas fait son chèque !"Ben devait y retourner.

"J'y vais seul. J'en ai pour cinq minutes !"Il sortit. Claqua la portière et me tendit son cigare.

Dehors il faisait froid. J'étais entouré d'une horde de crêtois qui ne pouvait se payer le concert. C'était les pires. Je me retrouvais calé dans mon fauteuil aux premières loges d'un spectacle édifiant. Ils ne parlent pas. Ils gueulent plus fort que leurs chiens. J'ouvre la vitre. Le cigare. Un crêtois en profite et glisse la tête dans la voiture.

"T'as pas une clope connard !"

Vitre ouverte…Grave ! Il me fait bouffer sa crête. Il pue de la gueule. Il me frotte sa balayette sur la figure. Il est ivre mort. Très dangereux. Il tente de passer les bras. Me serre le cou. Je le repousse.

"Je t'ai vu tout à l'heure ! Sale keuf d'enculé !"

Il se méprenait sur ma personne. Peut être le cuir. Le cigare  tombe sur le siège.

Je pousse sur sa tête. Il me faut virer tout ça de la voiture."Culé !".

Je suis coincé. A nouveau il passe les bras et tente de m'étrangler. C'est chaud.

Ils a les ongles noirs et éructe. Je vais fermer la vitre et lui coincer la tronche à ce pauvre minable.

Colère et désolation. Je me souvins d'un film avec Gérard Jugnot. Je fis monter tout doucement la vitre. La gorge, la tête coincée entre la vitre et la portière, il faisait moins le malin. Limite étranglé. Plus un mot. A cet instant Ben entra dans la voiture. Le chèque entre les dents. Il démarra. La tête de l'autre accroché à la voiture.

Je baisse la vitre et le libère de son coupe-gorge. Marche avant. Marche arrière. Sortir de ce parking. Les crêtois nous entourent, shootent dans les portières. Un vacarme. Ils vont nous buter. Une fille se met les doigts dans la bouche et vomit sur  le pare-brise. Un autre pisse. Tendresse et poésie.

Après quelques manœuvres hasardeuses, nous arrivons à semer cette violence.

Une violence ravagée par le désespoir. Ils dormiront sur le sol ce soir ou à huit dans une voiture quatre places. Heureusement le cigare de Ben s'était éteint.

"Je t’offre un verre."Ben paraissait très calme. Moi je suis d'accord.

Il avait eu son chèque. Dix kilomètres plus tard Nous entrâmes dans le bar restaurant "Chez pilou". La musique est présente :

"Ah ah ah la queue leu leu…"

Le patron est à son poste. Derrière le bar. Son bar. Ben connaît le taulier. Le taulier connaît Ben "L'homme orchestre".

"Salut Pilou, ça tourne?"

Je lui serre la main. Il s'en moque. La venue de la CESAM à cette heure semblait l'inquiéter. Je lui demande :

"C'est une noce? Un banquet?" Silence.

Qui suis-je? Moi? Pour lui poser des questions.

"C'est un banquet. Un bal. Le bal des croulants. Il faut avoir quatre vingt cinq ans minimum pour y participer. Cette année il n'y a pas d'homme." Précisa-t-il d'un œil sombre fixant Ben.

"Je peux jeter un œil pour jauger la salle?"Demanda le délégué de la CESAM. Pilou nous conduisant vers la salle de bal nous fit remarquer qu'il était à jour de ses cotisations s'étant fait mensualiser l’année Prochaine. Un truc clair…

Sur l'air de :"Ah le petit vin blanc qu'on boit…"Nous découvrîmes le bal des croulants. Des vieilles dames. De très vieilles dames, fardées par la pelure d'une orange côté verso, dansent une sorte de valse. Elles sont en chaussons et le bruit sur le parquet me rappelle les patins que je devais prendre naguère pour aller saluer ma grand-mère. Une odeur aussi. Une odeur de vieille cire d'abeille et de bonbons au miel.

Certaines sont en chaises roulantes Elles frappent dans leurs mains. Envieuses, chagrines. D'autres sont endormies."L'organisateur va les rentrer dans dix minutes."Fit Pilou en regardant l'horloge.

"182 ! Elles sont 182 !" Déclara Ben en dégainant sa calculette.

Retour au bar. Pilou nous avoua qu'il pensait en déclarer 150.Il règle les droits pour l'orchestre. Il faut bien se rattraper. Ben accepta l'offre.

"D'accord elles sont 150 et tu me fais le chèque maintenant."

La CESAM au galop. Pilou me regarda. Une complicité?

"Là, maintenant? Cinq cent euros? 500 euros au cul des vieux, au cul du camion?" Pilou sortit son chéquier. Ben prit les 500 euros et offrit sa tournée. Le patron s’octroya un café serré genre taille de guêpe. Un noir de chez «Strong». Ben prit un Médoc, moi aussi.

Les seniors guinchaient toujours.

"Ah ah ah la queue leu leu…"

"Juste une précision : combien de fois l'orchestre joue-t-il le même morceau?".

Je trouvais ma question pertinente et tentais de détendre l'atmosphère.

"500 euros !" Pilou se servit finalement un cognac. Un bon verre. Une pinte de bière. Dur métier. Il me répondit : "Là c'est le rappel. C'est la fin…"

Nous saluâmes le patron et le laissions avec son business. Sur le parking.

Cinq ou six cars attendent les mamies. Des blouses blanches s'activent. C'est la fin. C'est la fin de la soirée. La voiture de Ben, reconnaissable à ces nombreuses bosses, aux vomissures  sur le pare-brise, aux rétros cassés (les deux), est une épave. "Voiture de fonction ! Demain je passe au garage"

 

Ben démarra avec les Stooges. Rien de grave pour la CESAM.

 « Tout est bon pourvu qu’on ait le son ! » Ben, mon ami Ben, me ramena chez moi.Ce fut une bonne soirée et quand on aime la variété.

 FIN

The END

 

aspicaaaDessin: Aspic

 

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