En plein pèlerinage …
j’ai trouvé la serrure de la vérité au Jawahar Lodge.
RAMESWARAM /
Dimanche 2 Août 1970 :
Charles refait son sac à dos à la descente du train après 50h. de galère assis dans le couloir de la troisième classe...
Sculptures crues bigarrées... des bijoux de pacotille grimpent le long des statues… lianes d’offrandes… Shiva est honoré… dans une cuve trois parias décavés s’aspergent d’eau sacrée…des autels ornés de pétales de fleurs, de gamelles de riz, de fruits, Ganesh avec sa trompe aspire les roupies rebelles… les pèlerins se font raser la tête et dessiner des traits à la chaux sur tout le corps… un cortège de lépreux emboitent le pas aux cracheurs de feu.. les gurus ont des gueules de Ginsberg amaigris par une cure de désintoxication forcenée… Un chant de flute s’envole en bâtonnets de santal… Les Tamouls tirent la charrette du dieu ferraille… d’autres arrivent avec leurs gosses à consacrer…
Trois
heures de scènes de rue où il se passe vraiment tout et vraiment rien. C’est
totalement irréel nous sommes immergés dans la population. On a vécu le
pèlerinage avec eux. C’est le seul temple hindouiste en activité où nous avons
pu pénétrer et rester sans la moindre difficulté. La ville est envahie pour la
procession du 31 juillet. Tout est complet.
Ils
ont juste laissé un passage pour la voie
ferrée au milieu de l’océan, des dunes et des palmiers. Sur des kilomètres le
train semble marcher sur les eaux.
Pas
d’électricité ; des chevaux renversent à la nuit tombante les pèlerins qui
sommeillent dans la poussière des rues.
La bouffe devient une angoisse, le spécial-curry pour végétarien nous troue l’estomac. Nous nous rabattons sur les ananas et les bananes. Un délice ! Deux œufs sur une feuille de bananier, des mini-poissons épicés par Parvati et des chapatis, c’est la fête !!! Au petit matin… la pluie.
Dans la foule à Rameswaram le 31/07/1970. C'est mon anniversaire, j'ai 22 ans !
On
couche sur la terrasse en béton, le
Manager y a déposé quelques nattes. Il y a Claudius, Charles, deux Suisses,
une anglaise, Joëy et moi. Ce soir , un jeune pakistanais est venu partager
notre toit, il fait tourner son shillum de bois.
Sur la plage, près du port, là où l’on s’embarquera pour Ceylan, ils cuisent sans discontinuer des serpents de mer, blanchâtres presque transparents. Dans un tronc de bateau, ils touillent l’immonde soupe écumante, ça pue ! le 3 Août, on prendra le Ferry-Boat pour Jaffna.
