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INTERFéRENCES
Voyage harassant. Presque 12 h de bus avec un arrêt à
Kandahar. Un couple de français, des matheux, sont venus s’installer sur les
sièges derrière nous. Nous partageons avec eux quelques provisions.
Kabul, ça pue la merde. Une rivière verdâtre (qui a donné
son nom à la ville ) nauséabonde où les gosses se baignent. Les montagnes nous
entourent, nous encerclent, nous enferment . Epuisés par trop de défonces,
nous nous traînons. Chaque obstacle prend une dimension colosale.
Nous nous écroulons
au Najib Otel (sans H, en tout cas sur l’enseigne ), une piaule aux murs blancs
où les visiteurs précédents ont laissé des dessins aux craies de couleur.
Une
colombe, un arbre …un afghan armé d’un vieux fusil qui me fixait à Kandahar
pendant la halte, assis paisiblement sur son destrier… c’est l’idée de base de
la chanson qui suit, écrite ce soir là et qui sera mise en musique et
enregistrée l’année suivante avec Mods au sitar , Marc à la guitare électrique
avec archet et moi-même aux tablas.
L’endroit est paisible. Il y a même une tonnelle, un salon au milieu du jardin où l’on peut planer voluptueusement.
( Photos: Cap'tain Apogée )
NAJIB OTEL
la Colombe
Dans la mousse qui
s’évapore du bain de
Le soleil a fait son nid
en haut d’un palmier
Un zébu en bicarbonate
sortant de sa tombe
A quitté Khaybar Pass
survolant la frontière
Il y a encore un arbre
frisé dans la rivière
Des bandits en turban
chevauchant des aérogrammes
Les Fils du Grand Joint
s’allongent dans la clairière
Et étendent leur parapluie
sur un visage saignant ovale
La
Porte
Et la pipe en lame de
tortue. Nébuleux…
Les dents du narguilé
craquent ma mâchoire.
Un sourire, un iguane et
du sang dans la mare…
/ Cobra / Juillet 1970 / Kabul /
Mis en musique par Mods, Cobra et
Marc Blanc / Impro : 1971 /

La rivière Kaboul de nos jours ou ce qu'il en reste...